LE DROIT DES REGIONS ET LE SOUVERAINISME D'APRES PIERRE TOULLEC

Le droit des Régions et le souverainisme (1) par Pierre Toullec Première partie : le droit des Régions et l'appartenance à nos cultures locales Les droites Françaises et le "souverainisme" En France, la droite est multiple, bien plus que dans la plupart des autres pays Occidentaux. Le nombre de sujets sur lesquels nous nous écharpons sont donc très nombreux. En gros, les analystes politiques la divisent entre les Bonapartistes (centralisateurs, antiparlementaires), les Légitismistes (traditionalistes, parfois Royalistes) et les Orléanistes (Libéraux). Chacune de ces trois familles se considère comme la détentrice de la "vérité" à droite et refuse d'admettre que les deux autres soient de droite. Chacun joue à ce petit jeu de division, et nous nous "allions" temporairement lors des élections, non pas dans le débat, mais dans le seul jour de l'élection en votant (souvent à contre-coeur) pour le candidat de droite qui reste au second tour. Pourtant, il existe un sujet qui réuni la droite : le "souverainisme". Chacun des trois mouvements ont différents termes pour en parler. (Bien que chaque terme ait sa spécificité, en gros ils reprennent les mêmes conclusions à mettre en place. Ils ne s'agit pas de les mettre sur un plan d'égalité mais en parallèle pour les analyser). - Les "Nationalistes" et "Patriotes" sont dans une optique de défendre "la France" pour sa propre gloire et l'amour de leur pays. (Dans le détail, les deux termes ont une véritable opposition. De Gaulle avait une bonne définition de ces deux termes : "Le Patriotisme, c'est aimer son pays. Le Nationalisme, c'est détester celui des autres") - Les Libéraux sont plutôt dans une optique de subsidiarité de défense du pouvoir de la plus petite entité politique possible face aux organisations plus imposantes. Dans les trois cas, les défenseurs des différents mouvements en viennent à défendre un principe : la souveraineté. Si les libéraux n'assument souvent pas ce terme (très connoté), leurs positions en reviennent souvent dans les faits à la défense de la souveraineté de la France (opposition à l'Union Européenne qui cherche à créer un super-Etat Européen, au FMI et à l'OMC, organismes qui cherchent à réguler l'économie mondiale sans prendre en compte le marché, etc...). Autour de ce principe, la majorité des mouvements de la droite non-socialiste sont ainsi en accord pour défendre la souveraineté de la France face aux organismes supra-Etatiques. Bien entendu nous ne sommes pas réellement en accord sur les méthodes, ni sur les stratégies marketing de défense de nos idées. Cependant, nous sommes globalement en accord sur le fait que l'Union Européenne ne doit pas supprimer la souveraineté des Etats membres, et que Bruxelles ne doit pas diriger l'Europe (soit par attachement à notre pays, soit par attachement à la subsidiarité). La souveraineté n'est pas à géométrie variable ! Elle reste valable pour la France face à Bruxelles comme pour les Régions face à Paris Nous ne pouvons pas nous battre contre la construction Européenne actuelle en continuant à assumer ce que la IIIème République a fait aux Régions. L'unique différence entre ce que l'UE militante fait aujourd'hui à la France et à notre continent, et ce que la IIIème République a fait aux Régions est que les premiers réalisent du constructionnisme plutôt que de la simple destruction de cultures locales. Progressivement au cours de la IIIème République, la gauche au pouvoir, puis le gouvernement de Vichy et enfin sous le Général De Gaulle allié aux Communistes (avec le gouvernement provisoire à partir de 1944), les pouvoirs locaux ont été achevés, totalement détruits. C'est ici la contradiction la plus flagrante de nombre de "souverainistes". Nombre d'entre eux affirment défendre la souveraineté des peuples. Pourtant, lorsque des peuples sont minoritaires au sein d'un pays (comme en France), ils en viennent à défendre le "peuple national", et non la réelle population. Ainsi en France, se considérer Basque, Corse, Savoyard, Breton ou Normand avant de se considérer Français devient "anti-patriotique". Pourtant, les souverainistes réclament le droit au sein de l'Europe de clamer leur identité Française. Alors pourquoi refuser ceci aux peuples des Régions Françaises ? Aimer sa région (appelés d'ailleurs pendant des siècles "pays" au lieu de "régions") signifie t-il ne pas aimer la France ? Je pense (mais je peux me tromper) que cette Jacobinisation des esprits de certains mouvements souverainistes Français s'est surtout réalisée en réaction (dès l'après-guerre) à la création des organismes supra-Nationaux non-représentatifs. Défendre la France était s'opposer à ces organismes. La France devait donc être défendue sans modération. Tout régionalisme ou amour de son "pays" (Région) devient ainsi anti-Patriotique. Etre fier d'être Corse ou se considérer Basque avant d'être Français devient mal, et ces sentiments doivent être combattus par les "vrais" patriotes. Pourtant en 1914, une majorité de Bretons ne parlaient pas Français encore. Cela nous a t-il empêché d'aller nous battre pour la France ? En aucun cas. La France en a même encore des souvenirs aujourd'hui, avec par exemple l'expression "Baragouiner" (qui vient des mots Bretons bara (pain) et gwin (vin) prononcés par les soldats Bretons dans les tranchées pour demander leurs rations alimentaires). Le souverainisme Régional est tout autant légitime que le souverainisme national ! Ce "nouveau" patriotisme se développe d'autant mieux que face à l'Union Européenne et autres organismes internationaux, les urgences de débat changent de sphère. Ainsi, défendre la subsidiarité pour les Libéraux devient avant tout un combat pour conserver le pouvoir en France et non à Bruxelles. Le pouvoir local reste un sujet de préoccupation majeur, mais la plupart d'entre-nous nous focalisons sur ce débat au niveau national (je simplifie ici. Il est clair que nombre de Libéraux sont engagés dans le combat pour défendre le pouvoir des Rgions). La défense du droit des Régions est un principe souverainiste, patriotique Le "souverainisme" se doit donc de se focaliser sur la défense de la souveraineté de la France. Cependant, par soucis de cohérence, les souverainistes doivent aussi défendre la souveraineté des Régions. Sur ce plan, les Libéraux n'ont pas à être convaincus. En revanche, les "patriotes" doivent (il me semble) aussi rejoindre ce mouvement. Si De Gaulle avait raison, et que patriotisme signifie "amour de son pays", quel mal à laisser les provinciaux aimer leurs Régions ? La France elle-même a tout à y gagner. Le patriotisme Corse ou Breton n'a pas à se faire contre la France. Souvent, ces mouvements locaux en viennent à s'opposer à la France par nécessité. Si la France s'oppose aux provinciaux, dans ce cas le "patriotisme" impose un sentiment anti-Français. Et d'ailleurs, si le "patriotisme" s'oppose à la possibilité de prôner la fierté de sa Région, cela ne devient-il pas du nationalisme, opposé aux patries et cultures locales ? En revanche, si le patriotisme Français se réalise dans une acceptation commune, être Normand ou Basque devient une addition à l'identité Française. Aucun soucis donc à ce que les écoles Diwan (écoles Bretonnes enseignant le Breton comme première langue, et le Français comme seconde langue) se développent et enseignent un bilinguisme Franco-Breton, puisque les Bretons sont reconnus dans leur culture comme Français. L'acceptation de l'identité Française s'en trouvera facilitée, et légitimée. En revanche, le refus de reconnaitre les cultures locales délégitimise la primauté de la France. En résumé, si le souverainisme refuse l'expression des cultures locales, il s'agit d'un nationalisme Français, qui appelle un légitime patriotisme local anti-Français. En revanche, un souverainisme qui reconnait la souveraineté du peuple est patriotique, car il reconnait les particularités locales. Les patriotismes locaux s'ajoutent au patriotisme envers la France. Notre pays s'en trouverait grandit et renforcé. Le Gwen ha Du est un symbole connu de tous. Il est l'incarnation du patriotisme Breton, bien plus vivace que le patriotisme de la plupart des Français envers la France. N'est-ce pas une réalité typiquement de droite que les souverainistes devraient embrasser ? La France a donc tout à gagner à ce que l'ensemble de la droite reconnaisse la légitimité des cultures locales et la légitimité des patriotismes régionaux d'un point de vue purement sociétal, pour assurer la légitimité de notre pays. J'aborderai la nécessité de défendre les droits des Régions d'un point de institutionnel et économique dans une seconde partie. En effet, la reconnaissance des cultures locales vient bien entendu avec le pouvoir d'auto-détermination des Régions qui le souhaitent.

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